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Interview

Le grand retour des festivals du cinéma: 'Nous avons joué au poker'

Niels Ruëll
© BRUZZ
02/09/2020

Après le Brussels Short Film Festival en avril, l'organisatrice Céline Masset et son équipe ont dû reporter la troisième édition du Brussels International Film Festival du mois de juin pour des raisons virales bien connues. Reportés, pas annulés. Les deux festivals donnent le coup d'envoi de l'automne culturel.

Une tente abritant le bar du festival sur la place de la Monnaie, des projections en plein air au Mont des Arts et des projections à l'UGC de Brouckère, Flagey, Vendôme, Palace, Galeries et Bozar en présence de réalisateurs célèbres tels que Costa-Gavras et Lucas Belvaux ou de jeunes talents : ces deux festivals de cinéma vont mettre fin à des mois de désert culturel. Le populaire Festival du court-métrage de Bruxelles et le jeune Festival international du film de Bruxelles (BRIFF) sont curieusement organisés par la même équipe. La directrice du festival Céline Masset nous parle du parcours chaotique de ce double festival de cinéma en période d'interdiction.

Personne ne vous aurait reproché de sauter une édition du Brussels Short Film Festival et/ou du Brussels International Film Festival à l'instar du Festival de Cannes et du Festival international du film fantastique de Bruxelles. Pourquoi avoir persévéré ?
CELINE MASSET : Lorsque nous avons dû suspendre le Brussels Short Film Festival en mars dans la précipitation, nous avons imaginé organiser le festival en même temps que le BRIFF en juin. Mais la première vague a duré plus longtemps que prévu et nous avons dû alors déplacer les deux festivals.
Nous avons rapidement rejeté l'idée d'un festival en ligne. Ce n'est tout simplement pas ce que nous défendons. Nous voulons rassembler les gens et faciliter les rencontres. L'après-film, discuter dans une atmosphère chaleureuse, est crucial. Annuler ? Reporter ? À petite ou grande échelle ? Nous nous sommes constamment remis en question. Mais cela ne résout rien. Nous avons tranché et décidé de nous lancer. Nous avons fixé un rendez-vous, au secteur et au public: être à l'appel et montrer que le Bruxelles culturel est toujours vivant. La culture est tout aussi importante, voire plus importante, que le shopping. Si on a le droit de prendre l'avion par centaines, il devrait également être possible d'aller au cinéma. Un film est toujours un voyage mais en moins dangereux.

Persévérer, cela a-t-il été plus facile à dire qu'à faire ?
MASSET : C'était...euh...compliqué. D'autant plus que cela changeait presque tous les jours. Cent, deux cents, quatre cents : le nombre maximum de personnes autorisées change tout le temps. Après chaque nouvelle directive, nous devions réinventer ou réorganiser. Nous avons également dû nous adapter constamment en termes de contenu. La sélection a dû être revue car certains films n'étaient plus disponibles. Les membres du jury qui avaient accepté de venir en avril ou en juin ne sont plus disponibles en septembre. Cela ressemblait beaucoup à une partie de poker. Car on a beau avoir la volonté de s'organiser, encore faut-il y être autorisé et pouvoir compter sur ses partenaires. Sans eux, on n'y arriverait pas. Nous ne savions pas non plus à quoi ressemblerait la situation au début du mois de septembre. Nous espérions une rentrée tranquille, mais la Covid-19 est revenue plus vite que prévu.

Avez-vous pu un peu conserver le caractère festif du festival ?
MASSET
: Autant que possible. L'aspect festif d'un festival, la convivialité, est pour nous essentiel. Nous sommes autorisés à installer notre célèbre bar du festival place de la Monnaie. Une grande terrasse doit pouvoir accueillir le public et les professionnels dans le respect des normes de sécurité. Donc service à table, même si ce n'est pas notre style. Mais nous voulons que le public puisse prendre un verre après la projection, que ce soit au sein d'une bulle ou avec la distance nécessaire. Je constate que l'envie de se revoir est très grande. N'oubliez pas qu'il n'y a rien eu de comparable depuis le mois de mars. Les professionnels de l'industrie du cinéma, en particulier, attendent avec impatience les deux festivals.

Le Brussels Short a été un peu raccourci.
MASSET : Nous diffusons 157 films, ce n'est pas rien. Normalement, il y en a presque deux fois plus. Nous avons laissé tomber une grande partie de la sélection internationale. C'est une tradition d'inviter les réalisateurs étrangers à présenter leurs films. Ce n'est pas possible en ce moment, alors nous préférons les inviter en avril 2021. Espérons que tout ira mieux à ce moment-là. Nous nous concentrons sur la compétition belge avec à la fois des films d'étudiants et des films de professionnels. Parce qu'ils ont besoin de visibilité et ne peuvent pas attendre l'année prochaine. La projection de leur court-métrage pendant le festival est un moment festif qu'ils attendent parfois avec impatience pendant des mois.

Vous avez convaincu l'invité d'honneur Costa-Gavras de venir à Bruxelles pour le BRIFF. Expliquez-nous pourquoi le réalisateur de Z, Missing et Amen est un grand monsieur ?
MASSET : Costa-Gavras est un grand monsieur pour plusieurs raisons. Tout d'abord, sa filmographie est impressionnante. C'est un excellent cinéaste et un homme politiquement engagé qui défend toujours la bonne cause. Plus que jamais, on a besoin de gens qui, comme lui, ne baissent jamais les bras. Il est également président de la Cinémathèque française et continue à voyager pour soutenir le cinéma. Je suis sûr que dans sa master class, il ne parlera pas seulement de ses films mais aussi de l'importance du cinéma en général.

Avez-vous trouvé une solution à tout sur le plan logistique ?
MASSET : Nous collaborons avec les cinémas et ils sont habitués maintenant aux plans de circulation et aux mesures sanitaires. Nos projections en plein air au Mont des Arts représentent un vrai défi. Les années précédentes, les gens s'installaient où ils le pouvaient, mais ce n'est plus possible aujourd'hui. Nous devons réglementer la circulation. Un vrai casse-tête. Heureusement, notre équipe est énergique et très motivée à redonner du plaisir aux gens et leur faire découvrir des films. Les nombreux encouragements que nous recevons du secteur, des médias et des partenaires font beaucoup de bien. Nous voyons bien que nous ne nous mettons pas en quatre pour rien.

Les rendez-vous incontournables des BSFF et BRIFF

Oscars

une soeur girard

Une Sœur

Les gagnants de la compétition internationale et nationale du Brussels Short Film Festival sont automatiquement qualifiés pour la présélection de l’Oscar du meilleur court-métrage. Cette année, Delphine Girard a démontré que cette présélection peut également déboucher sur une nomination effective aux Oscars. La Bruxelloise a pu vivre l’aventure hollywoodienne grâce à Une sœur, un film glaçant sur une femme kidnappée qui appelle le centre d’appels d’urgence depuis sa voiture. L’Oscar a été finalement attribué à l'Américain Marshall Curry pour The Neighbours’ Window. Vous jugerez par vous-même si cela est justifié. Le festival bruxellois du court-métrage projettera tous les films nominés.

Des Hommes

des hommes Depardieu

Des Hommes

Si le monde du cinéma, à l’instar du Tour de France, décernait un prix quotidien de la combativité, l’appui de cheminée de Lucas Belvaux serait bien rempli. Dans Des Hommes, le film d’ouverture du BRIFF, le Belge francisé touche à un sujet encore très sensible en France. Gérard Depardieu joue le rôle d’un des quatre Français qui, pendant quarante ans, ont gardé le silence sur ce qu’ils ont vécu en tant que soldats en 1960 en Algérie. Le Festival de Cannes a décerné le label Cannes 2020 au nouveau film du réalisateur contestataire de Chez Nous, Rapt et La Raison du plus faible.

Rocks

Babyteeth

Babyteeth

Est-ce que Favolacce de Fabio et Damiano D’Innocenzo est un bon film ? Le magazine Variety hésite, Hollywood Reporter s’enthousiasme. Ce qui est certain, c’est qu’il y a du niveau dans la compétition internationale au BRIFF. Corpus Christi du Polonais Jan Komasa, Hope de la Norvégienne Maria Sødahl, Rocks de la Britannique Sarah Gavron et Babyteeth de l'Australienne Shannon Murphy sont autant d’excellents films qui devraient sortir cet automne. Cela ne va pas être facile pour l’actrice canadienne Marie-Josée Croze et les autres membres du jury de choisir un gagnant.

Z

Z

Z

Au cours des deux premières éditions, le Briff a attiré à Bruxelles des invités célèbres tels qu’Abel Ferrara, Terry Gilliam, Claudia Cardinale et Michel Hazanavicius. La Covid-19 n’aura pas empêché le festival d’accueillir un grand nom. L’invité d’honneur Constantin Costa-Gavras fut à l’origine d’un nouveau genre avec Z qui date d’il y a cinquante ans et qui associait les ressorts dramatiques des films populaires américains à un thème politique. De nombreux réalisateurs ont emprunté la même voie. Costa-Gavras lui-même n’a jamais cessé de faire des films qui analysent le pouvoir, les abus totalitaires ou les injustices. Le BRIFF organise une petite rétrospective et une master class.

Indiana Jones

indiana Jones

Indiana Jones : Les Aventuriers de l’arche perdue

Pour vous faire sortir de chez vous et faire des deux projections en plein air sur le Mont des Arts une réussite, le BRIFF compte sur deux superproductions qui ont marqué les années quatre-vingt. Robert Zemeckis a surpris en 1988 en mariant dans Qui veut la peau de Roger Rabbit film noir avec des personnages de dessins animés légendaires comme Betty Boop et Bugs Bunny. Steven Spielberg pensait en 1981 avoir tourné un film de série B sur un archéologue aventureux qui use plus souvent du fouet que d’un stylo, mais aussi bien le public que ses collègues ne s’y sont pas trompés. La superproduction Indiana Jones : Les Aventuriers de l’arche perdue a remporté cinq Oscars et a eu trois suites.

BRUSSELS INTERNATIONAL FILM FESTIVAL 3 > 13/9, divers lieux, www.briff.be
BRUSSELS SHORT FILM FESTIVAL 2 > 12/9, divers lieux

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