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Georges Lini s'attaque à Verhulst: L'entrée du christ à Bruxelles

Gilles Bechet
© BRUZZ
31/10/2016

Georges Lini adapte pour la scène la fable grinçante de Dimitri Verhulst avec la complicité d'Éric De Staercke venu offrir au public sa vision des événements pas banals qui ont traversé la capitale.

Sur le tableau L'entrée du Christ à Bruxelles, le fils de Dieu débarque dans la capitale dans une ambiance de kermesse grimaçante. Malheureusement pour nous, le chef-d'œuvre d'Ensor est à Los Angeles, loin de la Grand-Place. Avec son roman, Dimitri Verhulst a rendu cette prophétie de nouveau un peu plus belge, mais ce qui intéresse l'auteur flamand, c'est la déflagration sociale qui a suivi l'annonce du retour du Sauveur avec des bouleversements en cascade jusqu'au jour J. Le comédien et metteur en scène Georges Lini rêvait de le porter à la scène. Il l'a fait avec Éric De Staercke en raconteur itinérant et un pays, soudainement réconciliés avec eux-mêmes.

Qu'est-ce qui vous a donné envie d'adapter ce texte, qui, a priori, n'est pas destiné à la scène ?
Georges Lini : C'est un auteur que j'adore. J'ai lu les quatre bouquins traduits en français. J'adore son univers belgo-belge avec cette capacité à pointer sans détour les dysfonctionnements de la société, tout en montrant une grande tendresse pour les gens. Ce qui m'intéresse aussi c'est qu'il s'inscrit dans le monde qu'il décrit, il ne juge pas. Il s'accuse lui-même d'être dans une forme de passivité. C'est magnifique d'humanité. Le texte n'avait pas besoin de beaucoup de changements, je l'ai gardé tel quel avec quelques coupures.

Comment avez-vous transposé sur scène ce récit au ton très particulier ?
Lini : Le récit est celui de quelqu'un qui raconte tous les événements qui ont suivi l'annonce de l'arrivée du Christ à Bruxelles. Dans le spectacle, on a un conférencier qui vient expliquer ce qui s'est passé et parfois donner son point de vue sur les événements. C'est aussi pour lui une manière de décrire la Belgique et expliquer son fonctionnement et son non-fonctionnement. Cette histoire démarre sur un postulat qui peut paraître absurde, mais on l'accepte. On gère ça à la belge, sans en faire tout un plat. On n'est pas toujours d'accord mais on s'organise. C'est une magnifique carte de visite de la Belgique et de son esprit. Comme le conférencier, on espère tourner avec ce spectacle à l'étranger. La lecture peut se faire à plusieurs niveaux. Les Belges se sentiront chez eux. Ils vont reconnaître leur mode de fonctionnement face aux problèmes politiques, linguistiques ou aux sans-papiers, et tout ça avec une réjouissante liberté de ton. Pour les étrangers, c'est une manière ludique de découvrir qui nous sommes à travers les mots d'un de nos grands poètes.

Pourquoi avez-vous choisi Éric De Staercke ?
Lini : Je voulais quelqu'un qui soit à la hauteur du texte. Le conférencier est un personnage un peu excentrique qui décide de tout quitter pour raconter au monde ce qui s'est passé à Bruxelles cet été-là. Pour ce rôle, je ne voulais pas de rôle de composition, mais un acteur qui puisse venir avec ce qu'il est. Avec son univers cinglant et touchant en même temps, Éric était mon premier choix. C'est aussi la première fois que je fais un monologue et je pouvais me reposer sur ses épaules qu'il a assez larges pour être seul sur scène.

Il y a aussi tout un travail multimédia ?
Lini : Oui, pour casser le risque de monotonie d'un type derrière sa table, on a des projections qui accompagnent le texte sans le surligner. C'est un travail d'équipe que j'ai mené sur le plateau avec Sébastien Fernandez pour la vidéo et le son et Jean Goovaerts pour l'animation.

Aux yeux de certains, surtout ceux qui ne l'ont pas lu, Dimitri Verhulst passe pour un provocateur.
Lini : Il prend des thèmes assez graves et les développe en gardant toujours de l'empathie pour les gens. Il n'y a jamais d'attaque personnelle. Il dit les choses frontalement et n'a pas peur d'en montrer le ridicule. Il n'a aucun tabou et il y a chez lui une forme de sagesse populaire, jamais populiste. On confond souvent théâtre politique et théâtre militant. Le vrai théâtre politique, c'est un théâtre qui fait réfléchir plutôt que de donner des solutions toutes faites. Ce que raconte la pièce est plein d'humanité. La conclusion, c'est qu'il suffirait d'un rien pour que ça marche. On est responsable du monde qui nous entoure. C'est drôle, ça fait rire et grincer des dents, mais le fond est très sérieux.

> L'entrée du Christ à Bruxelles. 8 > 26/11, 20.30, Atelier 210, Etterbeek

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