L’an dernier, le premier spectacle du jeune metteur en scène liégeois Fabrice Murgia, Le Chagrin des ogres, était à l’affiche de la prestigieuse scène de l’Odéon à Paris. Une aventure rare dans le milieu théâtral francophone. La clé de son succès ? Un théâtre d’art et d’essai, ancré dans la solitude de notre époque mondialisée, saturée d’infos, d’échanges et de réseaux sociaux. Sur scène, une réplique peut naturellement prendre la forme d’un SMS et un dialogue celle d’un chat. Associé, à 28 ans, au Théâtre National, Murgia y présente sa nouvelle création, Exils, dans le cadre du projet européen Villes en scène, aux côtés de célébrités comme Joël Pommerat pour la France, Emma Dante pour l’Italie, etc. Un projet dont l’objectif est de questionner le « vivre ensemble » et la multiculturalité des villes européennes.
Que raconte votre nouvelle pièce ?
Fabrice Murgia : C’est l’histoire de quatre destins, en tableaux courts et rapides, comme une machine en marche. Il y a un migrant noir qui s’efface, un homme de 30 ans qui fantasme sa mort, une humanitaire en burn out et une mystérieuse vierge en uniforme qui brûle et représente l’autorité passive. Ils avancent vers une fatalité que l’on sent dès le début. Le spectacle parle du sentiment occidental de culpabilité, très complaisant parfois dans notre engagement.
Un spectacle axé sur l’exil ?
Murgia : Axé sur le rapport à l’autre, l’impossibilité de vivre ensemble, de communiquer réellement. Exils parle de solitude à travers des gens réels dans un univers fantôme, de gens perdus dans l’abîme, dans le choc de l’autre, au point de vouloir se cogner. Ils s’inventent des maladies et des dangers parce qu’ils s’ennuient, seuls et ensemble, malgré un flot de paroles. En compensation, l’univers est flottant, dans une saturation de blanc qui permet de respirer.
Dans un univers plastique qui fait partie de votre signature…
Murgia : Je suis fana d’art contemporain, j’aime que cela imprègne mon travail. Mais avant tout, j’aime raconter des histoires par le spectacle vivant. La radicalité n’est jamais gratuite. Dans Exils, on a contrebalancé l’univers du morbide par une saturation de blanc. Je fais un spectacle de là où je suis, le théâtre contemporain. Je ne propose pas une analyse à la Al Gore mais une fable poétique ancrée dans le réel et la fiction. J’essaie de donner des sensations, de décrire l’imperceptible, de saisir des états du monde.
Quid de la scénographie ?
Murgia : Une bâche plastique ouvre et enferme la scène. On a l’impression que les comédiens flottent sur un nuage. Le son, la lumière et la vidéo sont tout aussi importants que le texte et les interprètes. Les images flottent. Avec des caméras live, on a imaginé des images, du sol aux murs, se déplaçant dans l’irréel, tout comme le son et la lumière qui ne s’arrêtent jamais, dans une recherche instable. Dans Exils, tout peut se déplacer sans que l’on comprenne comment cela se passe.
Exils
24/1 > 11/2, 20.30 (25/1, 1 & 8/2: 19.30), €10/15/19,
Théâtre National, boulevard E. Jacqmainlaan 111, Brussel/Bruxelles,
02-203.53.03, www.theatrenational.be
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