S’il est un pays estival, c’est bien la Grèce. Coincée entre le soleil et la mer, cette terre généreuse en bons produits sacre une douceur de vivre… dont certains temps forts se glanent à Bruxelles.
La Grèce est l’une de ces nations qui constituent notre horizon. Passé ou futur, peu importe où l’on regarde, sa silhouette se profile. Un coup d’œil historique ? Ce pays se découvre comme fondateur de l’espace européen à la faveur d’avatars politiques qui ont accouché de la démocratie. À l’inverse, d’autres pensent que la Grèce ne constitue pas seulement un patrimoine. Ceux-là la voient comme un horizon, un futur qui nous attend. Qu’on se le rappelle, le slogan « Le peuple grec est devant nous » a longtemps été tagué sur l’un des tunnels de l’avenue Fonsny.
Le message était à comprendre à la manière d’une piqûre de rappel pour nous prévenir des excès dévastateurs d’une Europe acquise au néolibéralisme. Le tout pour une addition lourde dont le pays de Socrate a payé le prix plein. Si la Grèce est partout, ce n’est pas pour autant que nous lui avons réservé le sort qu’elle méritait, longtemps le malentendu a été au cœur de notre relation avec elle.
Avouons-le : on a tous poussé la porte d'une de ces cantines à la façade blanche et bleu marine. Non sans avoir jeté au préalable un coup d'œil admiratif à l'imposant fronton, façon Parthénon, faisant office d'enseigne. On n'y a pas spécialement mal mangé. Juste un peu lourd. On a beaucoup ri. Bu de l’âpre retsina. Rêvé devant les posters de couchers de soleil dans les Cyclades. Improvisé un sirtaki avec les serveurs, reçu l'ouzo du patron... et même cassé quelques assiettes.
C'est devenu moins drôle lorsqu'on s'est rendu compte qu'il y avait là un concept « clé sur porte » cloné à l'infini. Du vrai fast-food pour béotiens de la table. Comme si, de la Grèce et de son infinie variété de cuisines, ne subsistait que cette comédie certes amusante, à la manière d’une caricature grotesque signée par un Aristophane moderne, mais infidèle. Aux yeux de nombreux Grecs eux-mêmes, il n'y avait pas de feuille de vigne assez grande pour masquer cette trahison gastronomique.
Au diable la carte postale
Cela dit, au départ, pas de mauvaises intentions. Devant le succès du tourisme en général et de la Grèce en particulier, certains expatriés ont tenté une reconversion dans la restauration. La volonté de bien faire est là, mais, comme l'explique Constantin Erinkoglou, patron du Notos à Bruxelles : « Une modestie naturelle a poussé les restaurateurs à se calquer sur une certaine image que les vacanciers ramenaient d'un séjour là-bas.
Un modèle culinaire précis et rigide s'est alors imposé. Il correspondait à ce que les étrangers avaient aimé en Grèce. On n'a pas cherché à les orienter vers d'autres saveurs. C'était facile à préparer et ça marchait bien. D'autres expatriés ont connu ces déboires : les Espagnols et la paella, les Italiens et les pizzas... Cela prend du temps avant qu'une gastronomie ait sa chance. »
Heureusement, depuis quelques années cette carte postale ne séduit plus. Sous l'impulsion de quelques personnalités bruxelloises, le tarama fluorescent et les pseudo-colonnades doriques laissent la place à une image beaucoup plus fidèle.
Quelques produits sont emblématiques de cette renaissance, ainsi du vin résiné. Ne l’oublions jamais cette boisson possède des lettres de noblesse : ce mode d’élaboration trouve son origine dans l’Antiquité - il y a 3500 ans - lorsque le vin était conservé dans les amphores que l’on tapissait de résine de pin pour préserver le jus de la vigne de l’oxydation.
Au fil du temps, la reproduction de ce procédé est devenue une habitude gustative, le retsina ayant un goût très particulier. La bonne nouvelle c’est qu’il existe une new wave, un nouvel engouement autour de cette boisson.
Larmes de pins
Envie de découvrir ? Deux adresses s’imposent. La première est Mig’s World Wine, un caviste faisant valoir une sélection atypique. Pour 10 euros, il propose la retsina Ritinitis Nobilis du domaine Gaia. Issue du Péloponnèse, cette cuvée est composée à 100% du cépage Savatiano. En bouche ? Une sensation de fraîcheur avec des notes aromatiques de menthol ainsi qu’une belle longueur. Séduit ?
À nos yeux, une autre bouteille mérite que l’on s’y intéresse, il s’agit de la retsina Tear of the Pines du domaine Kechris (Goumenissa en Macédoine). Il s’agit ici d’un 100% Assyrtiko qui fait valoir une belle acidité marquée par une bouche évoquant le zeste de citron. Plus cher, ce flacon est vendu 15 euros chez Sani au numéro 25 du boulevard de Dixmude.
Pays de vignes
Mais il n’y a pas que le retsina, c’est carrément tout le vignoble grec qui enthousiasme. Une adresse s’impose en la matière : Canette Quality Wines. Cette boutique a pris la mesure de l’effervescence qui secoue les vignes helléniques. Exit l’image de la piquette fatiguée de soleil, une nouvelle génération de bouteilles équilibrées et expressives a vu le jour sous la houlette de vignerons en phase avec une vision contemporaine de l’œnologie.
Emmenée par Thomas Tsanis, pionnier du vin grec sous nos latitudes, l’enseigne restitue toute la mosaïque d’un vignoble agité dans les 1000 mètres carrés de son entrepôt. Canette propose la crème de ce qui se fait : des maisons comme Skouras, Mercouri, Tselepos ou Claudia Papayianni. Le tout pour une expertise qui séduit les meilleurs restaurants belges, de l’Air du Temps au Sea Grill. Une gamme de produits variés - poutargue, huiles, fromages… - complète le tableau.
Avec le vin, l’huile grecque mérite également que l’on s’y intéresse. Notre préférée se nomme Lakudia. Elle se déniche chez Oliviers&Co, il s’agit d’un nectar originaire de la Laconie, près du charmant village de Monemvassia. Pour environ 15 euros, on a là une huile joliment fruitée rehaussée d’une fine pointe d’amertume.
Tout un plat
Une dernière question se pose : quels sont les restaurants qui rendent justice à la Grèce ? La réponse que l’on fera est à deux vitesses. D’abord, un établissement qui a le mérite d’être ouvert tous les jours et de proposer une addition raisonnable : Les Enfants du Pirée. Bref, un lieu parfait pour une visite familiale.
C’est que la fratrie Karagianis a opté pour un compromis entre les produits de là-bas et les goûts d’ici. Pour en prendre la mesure, il faut tester l’assortiment élargi d’entrées qui va du saganaki (fromage chaud) à la friture d’éperlans sauce tartare. On retrouve là toute la générosité d’un pays gorgé de soleil.
En ce qui concerne les plats plus consistants, l’enseigne est équipée d’une rôtissoire qui ne fait pas seulement tourner la tête des cabris, cochons de lait, gigots, homards et autres poulets fermiers. Il reste que le must en matière de gastronomie grecque à Bruxelles est assuré depuis quelques années par le Notos.
Cet ancien garage, reconverti en loft épuré est réjouissant. L’expérience n’est pas donnée, compter 50 euros le couvert, mais elle est unique et inoubliable à l’image des raviola de Tinos (18€), petits carrés de pâte farcis aux blettes et accompagné de marmelade de tomates, ou encore de la très fondante seiche servie dans un risotto kritharaki (25€), du nom de ces pâtes qui ont la forme de gros grains de riz.
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