L'été de Frédéric Nicolay

Même s’il a esquissé des projets à l’étranger, Frédéric Nicolay n’est jamais autant lui-même que lorsqu’il est à Bruxelles. C’est donnant-donnant: si la capitale lui réussit, il a en retour beaucoup contribué à en forger le style. Pour BRUZZ, il livre ses bons plans de l’été.

BOIS DE LA CAMBRE À BRUXELLES
« Je trouve qu’il est important d’aller dans les parcs. Ce sont des endroits où l’on est obligé de se confronter aux autres. J’aime l’idée d’un lieu public qui est à la fois à tout le monde et à personne. En théorie, tout un chacun y a les mêmes droits. Un parc, ça libère la parole, on parle avec des gens à qui on n’adresserait jamais la parole dans d’autres contextes. Bien sûr, il est beaucoup plus facile de rester dans le confort de son petit jardin entre gens du même monde », explique Frédéric Nicolay à la terrasse du Flamingo.

Si l’on a parfois critiqué les adresses qu’il signait, l’homme a toujours eu à cœur d’embellir Bruxelles. On se souvient de platanes plantés sur la place Saint-Géry et devant le Walvis. Il y a également eu, le long du Canal, cette aubette en métal poli miroir conçue pour les usagers du Tram 18.

Sans oublier une intervention sur la petite place qui se trouve au bout de la rue d’Alost. À ses frais, il a fait couvrir le mur de parpaings avec des palettes de transport. À l’époque, il avait même créé une sorte de petite agora à l’aide de vingt-sept troncs de hêtres « récupérés à la suite d’une exposition sur le Mont des Arts » et fixés à même le sol.

PLACE HENRI CONSCIENCE À IXELLES
Située au croisement des rues du Collège, Jean Van Volsem et Maes, cette petite place s’ouvre sur un beau marronnier qui se dresse au centre d’un petit parterre d’herbe. Elle est dédiée à Henri Conscience, l’écrivain dont on a dit qu’il avait appris à lire à son peuple. Si l’endroit n’a rien de spectaculaire, il dégage une poésie à laquelle Frédéric Nicolay n’est pas insensible.

C’est que, même s’il ne l’avouera jamais, derrière son physique de rugbyman se cache un cœur tendre. Un vrai gentil qui marche au coup de cœur, capable d’engager un serveur sur sa seule histoire ou d’embarquer dans ses aventures quelqu’un dont la pensée le fascine.

Ce qui lui plaît place Henri Conscience ? « En été, lorsqu’il fait beau, il y a des artistes qui sortent deux ou trois tables et qui improvisent un espace de sociabilité », raconte l’intéressé. Nicolay aime profondément Bruxelles, il n’aime rien tant que la voir vivre. Sa saga est d’ailleurs celle de quelqu’un qui réveille la capitale à coups d’électrochocs.

Il a toujours opéré dans ces quartiers délaissés de tous, ces îlots urbains auxquels plus personne ne croit. Il a commencé la réanimation du côté de la rue Dansaert - près de la Bourse - et aux Halles Saint-Géry. À l’époque, il a bien fait rire tout le monde : personne n’imaginait qu’un jour il traînerait de ce côté de la ville tout le Bruxelles qui bouge. Il y a fait un malheur.

Il a remis ça avec la place Flagey, le bout de la rue Antoine Dansaert, la Porte de Halle… La différence entre le Nicolay des débuts et celui d’aujourd’hui ? Une certitude vissée dans le crâne : la gestion d’un lieu Horeca est une purge, il se contente désormais d’en dessiner les décors.

NANOUK
Pour la réouverture du Flamingo, Nicolay a déniché de nouveaux fournisseurs comme il en a le secret. Parmi ceux-ci, Nanouk, un glacier artisanal dont les ateliers se situent du côté de Saint-Gilles. Le pitch ? Des glaces et des sorbets avec peu de sucre, pas de colorants et pas de conservateurs.

Ainsi d’un esquimau fraise – bio belge – et menthe qui met tout le monde d’accord. Pour savoir où trouver leur production qu’ils vendent régulièrement sur les marchés, il suffit de suivre leur page Facebook. Donner sa chance aux petites adresses, ça lui plaît. Pas étonnant pour quelqu’un qui est sorti simple commis de l’école hôtelière de Namur.

PEINTURE FRAÎCHE
Depuis qu’il signe les décors de lieux de divertissement, Frédéric Nicolay n’a eu de cesse de renouveler son inspiration. Pour ce faire, il voyage beaucoup, ce qui lui permet de réamorcer son imaginaire. Brésil, où il s’intéresse à l’œuvre de Lina Bo Bardi, côte Ouest des États-Unis, Marfa (Texas) où il se passionne pour l’œuvre de Donald Judd, Inde… il parcourt régulièrement les méridiens.

Quand il n’est pas en voyage, il fréquente compulsivement les librairies. Les livres ne sont-ils pas le meilleur transport pour effectuer des voyages immobiles ? Ainsi de Peinture Fraîche, librairie spécialisée dans les beaux-arts, la photographie et l’architecture. « J’y passe tout mon temps », confesse-t-il.

HUMUS & HORTENSE
« C’est le restaurant le plus émouvant du moment à Bruxelles », explique celui à qui on doit le décor du Café Belga. Frédéric Nicolay aime beaucoup la cuisine de Nicolas Decloedt. Légère et centrée sur les légumes, elle va comme un gant aux beaux jours.

FIGHT CLUB
Après Crab Club, Oficina, Humphrey, Grand Central, West-End Izakaya, Flamingo… Nicolay promet une nouvelle adresse pour la rentrée, au 50 de la chaussée de Waterloo. Son nom ? Fight Club. Quand on lui demande à quoi va ressembler le projet, il n’a qu’une réponse : « La première règle du Fight Club est : il est interdit de parler du Fight Club. » Alors, il ne reste plus qu’à deviner.

Sachant, ce que l’on sait de lui, le lieu devrait s’inscrire dans une certaine continuité, celle qu’il développe depuis plus de 25 ans. Car à l’inverse des Costes et autres Terence Conran dans les autres grandes villes européennes, il signe des adresses dont les décors n’excluent pas.

LES ÉTANGS D'IXELLES
« C’est un endroit magique de la ville, un cadre de rêve. Mon souhait le plus cher, c’est de pouvoir y organiser un jour un festival de musique classique, comme celui de La Roque-d'Anthéron. Ce serait extraordinaire de pouvoir recouvrir une partie des étangs pour proposer des concerts à ciel ouvert », conclut-il songeur.