Critique théâtre: ‘Hamlet’ avec un petit quelque chose en plus

Les actrices et acteurs du Teatro La Plaza de Lima donnent leur version, pleine de fureur, d’humour et de dérision de ‘Hamlet’ comme un miroir sincère du regard que porte la société sur leur syndrome de Down.

Peu après l’entame du spectacle, les membres de la troupe du Teatro La Plaza de Lima s’avancent vers le devant de la scène. « Ne vous attendez pas à voir le Hamlet que vous croyez. » « Certains d’entre-nous vont chercher leurs mots, il y aura des silences, ce n’est pas grave. » « Quand je ressens une forte émotion, je peux parfois afficher une grimace. » ajoute une autre. » « Soyez patients, prenez votre temps, soyez relax. »

En effet, les huit actrices et acteurs qui présentent leur version d’Hamlet sont toutes et tous porteurs du syndrome de Down. Ils n’en sont pas moins comédien.ne.s et l’histoire du prince du Danemark dont elles et ils coiffent la couronne à tour de rôle se confond avec leur propre histoire, leurs propres aspirations.

L’autrice et metteuse en scène du spectacle Chela De Ferrari explique que ce projet est né de sa rencontre avec Jaime Cruz, qui occupait la fonction d’ouvreur dans son théâtre et qui disait qu’il était, qu’il voulait être, acteur. Jaimlet, ainsi se présente-t-il à un moment dans la pièce comme si son personnage et son interprète avaient fusionné. Dans ce Hamlet d’une énergie et d’une fantaisie de tous les instants, on fait des incessants aller-retours entre le monde d’Hamlet et celui des personnes porteuses du syndrome de Down.

Être ou ne pas être

Avec sincérité, impétuosité, légèreté, et avec humour, en chanson et en rap, au Danemark ou au Pérou, iels parlent d’amour, du regard des autres et de leurs parents qui ont tendance à décider et à penser pour eux. Les liens entre Ophélie et ses parents prennent alors une autre dimension.

Être ou ne pas être, la phrase qui ouvre le célèbre monologue, telle est la question, leur question. Doivent-elles, et ils, continuer à vivre en souffrant les tourments du monde, le regard des autres qui les prennent pour d’éternels enfants ou pour des « anges » et la non-reconnaissance de leurs droits, ou alors mettre fin à la vie et faire le grand saut vers l’inconnu. Mourir ou dormir. Si la fin de l’histoire de Hamlet est connue, celle de celles et ceux qui ont croisé son chemin et ses questionnements reste ouverte et les formidables comédiennes et comédiens du Teatro La Plaza ne sont pas pressés de la refermer. « Je ne suis pas comme les autres. Je ne vivrai pas comme les autres. » assure l’un d’eux dans le final.