Une trappe à voyage temporel et un iPenis sont des choses tout à fait normales dans le monde de Quentin Dupieux. Le cinéaste de l'absurde qui ne cesse jamais d'étonner a donné le titre Incroyable mais vrai à son nouveau film, alors que c'est exactement l'inverse.
Film de la semaine : 'Incroyable mais vrai'
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Les réalisateurs de film qui forment un genre à eux-mêmes sont plutôt rares. Quentin Dupieux en est un bon exemple. Il vaut mieux s'attendre à l'inattendu de la part du Français, qui avait créé le tube d'électro-house 'Flat Beat' sous le nom de Mr. Oizo. Il est très fort dans la création de concepts bizarres et la mise en scène de situations absurdes, comme si de rien n'était, comme si c'était la chose la plus normale au monde.
Dans le film Rubber (2010), devenu culte entre-temps, les personnages principaux étaient un pneu de voiture meurtrier et les forces nécessaires à l'accomplissement de son désir. Dans le métafilm déjanté Réalité (2014), un caméraman partait en quête du cri de film ultime. Dans Le Daim, c'est une veste en daim qui parle à Jean Dujardin et dans Mandibules (2020), deux âmes simples voient une opportunité économique dans une mouche géante trouvée dans le coffre d'une voiture volée. Au début, Dupieux visait un public de niche, qui s'est progressivement agrandi.
Quentin Dupieux a non seulement son propre style, mais peut-être plus important encore, un modus operandi qui lui permet de créer quasiment chaque année un film complètement fou
L'homme a non seulement son propre style, mais peut-être plus important encore, un modus operandi qui lui permet de créer quasiment chaque année un film complètement fou. Il travaille avec des idées fortes et des petits budgets, et fait beaucoup de choses lui-même : l'écriture, le tournage, la réalisation, le montage, la musique. C'est ainsi qu'il a par exemple réussi à présenter Fumer fait tousser à Cannes cette année, alors qu'Incroyable mais vrai était déjà en train de conquérir les salles obscures de France et de Belgique.
On serait bien déçu si l'histoire n'était pas étrange. À un jet de pierre de Paris, un couple d'âge mûr emménage dans une nouvelle maison avec une trappe vers la cave plutôt spéciale. Quand vous y descendez, vous avancez de douze heures dans le temps tout en rajeunissant de trois jours. Alain (Alain Chabat) n'aime pas trop la trappe. Marie (Léa Drucker) adore l'effet rajeunissant.
Le chef d'Alain (Benoît Magimel), quant à lui, fait appel à la technologie pour rester éternellement jeune et viril. Afin de continuer à offrir du plaisir à sa femme plus jeune que lui (Anaïs Demoustier) et à lui-même, il a fait fabriquer un pénis électronique au Japon qu'il contrôle via une appli. Leur combat grotesque contre la vieillesse se prête parfaitement à un moralisme ordinaire mais cela n'intéresse pas Dupieux. Si vous voulez un message, il faut s'adresser à la poste, pas à lui. La situation est assez originale pour qu'on s'y arrête, et se prête parfaitement à l'humour.
Comme souvent, Dupieux a un peu de mal à trouver une issue à son expérience imaginaire, mais on lui pardonne car ses inventions sont non seulement crédibles et pas vraies, mais aussi visuellement et philosophiquement intéressantes. Et il est bien le seul à savoir faire ça.
INCROYABLE MAIS VRAI
FR, dir. : Quentin Dupieux, act. : Léa Drucker, Alain Chabat, Benoît Magimel, Anaïs Demoustier
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