See Festival : les Balkans aux Bozar

Acronyme de "South-Eastern Europe", le See Festival offre un point de vue étonnant sur les cultures d'Europe du Sud-Est. Loin des stéréotypes et des lieux communs, le rendez-vous initié par Bozar se veut moderne, représentatif et ouvert d'esprit.

Un objectif ambitieux, certes, mais qui s'avère réaliste au regard de l'affiche déployée. À travers des rencontres, des séances de cinéma et, surtout, une programmation musicale audacieuse, l'événement traverse les Balkans et les mémoires de l'Empire ottoman pour déboucher sur quelques temps forts.

À commencer par le concert de Damir Imamovic. Héritier des musiques traditionnelles bosniennes, ce dernier profite de son passage à Bruxelles pour dévoiler les chansons du récent Singer of Tales, album enregistré en compagnie de Jerry Boys (Buena Vista Social Club) et coproduit par Joe Boyd, ingé son connu pour avoir lancé les carrières de Nick Drake, Vashti Bunyan ou Fairport Convention.

Venu de Nicosie, Monsieur Doumani se charge pour sa part de brouiller les pistes. Sous le couvert d'une identité francophile, le trio chypriote embrasse le dialecte de son terroir, se permettant au passage quelques voyages inédits : des allers-retours entre rebétiko et rock anatolien, blues touareg et folk psychédélique. Sensations garanties.

Le See Festival se targue aussi d'accueillir une autre pointure. Clef de voûte de la révolution culturelle turque, le groupe Mogollar sera en effet au rendez-vous pour célébrer son cinquantième anniversaire. Inventeur d'un genre à part – l'Anadolu pop –, le groupe a ingéré les courants novateurs et amené le rock psychédélique sur le terrain de son répertoire traditionnel, ouvrant ainsi la voie à des personnalités telles que Selda Bagcan, Barıs Manço ou Erkin Koray. Référence ultime pour des jeunes pousses comme Altın Gün, les emblématiques Mogollar ont écrit un chapitre de l'histoire du rock, désormais connu sur le bout des doigts par les meilleurs élèves du bahut (de Kikagaku Moyo à King Gizzard & the Lizard Wizard). De quoi jeter un autre regard sur les musiques actuelles.