Dans une chambre d’hôtel à Ostende, la passion qui embrase Emily et Anna ne peut éviter l’issue fatale qu’impose le conformisme de la société. Familier de Hugo Claus, dont il a déjà adapté deux pièces, Christophe Sermet porte à la scène la nouvelle Dernier Lit. En ouverture au spectacle, il réagit à trois citations de l’auteur flamand.
Christophe Sermet: 'Le plus gros menteur, c'est Hugo Claus lui-même'
Les plus beaux poèmes d’amour sont faits par des crétins mercantiles et mesquins qui ne peuvent avoir de femme
Claus ne parle jamais d’amour frontalement comme si le mot était d’emblée suspect. Il ne fait que tourner autour, il y a chez lui une forme de dégoût et une suspicion pour tous ces mots fourre-tout comme amour ou liberté. L’amour est présent à chaque page, mais il est souvent lié à la mort. Comme si ce mot, amour, était trop tiède, il va plutôt parler de passion.
Il n’évoque pas l’amour pour le célébrer mais plutôt pour démonter tous les pièges que la société fabrique en son nom. Dans Dernier lit, l’amour est indissociable de la mort et il passe d’abord par la chair. Entre Anna et Emily, tout ça n’a pas d’importance car le désir a une existence propre qui se dissocie de la morale. La pièce nous emmène dans une spirale mortifère mais Claus parvient à y distiller un humour, une joie et un sarcasme qui en font un très beau matériau pour le théâtre.
Mens pour survivre, mais fais attention à ne pas t’arnaquer toi-même
Le plus gros menteur, c’est Claus lui-même, c’est un incroyable pourvoyeur de fausses vérités. Son œuvre est faite de gens qui s'arrangent avec leur vie. Il ne supporte pas l’idée que quelqu’un de bien soit forcément sincère.
Dans Dernier lit, il se met dans la peau de ces deux femmes avec une sincérité absolue mais avec une âme de menteur. Derrière ce dédoublement, il y a la vérité de la passion parce que le désir n’a pas de genre. Pour ne pas s’arnaquer soi-même, il faut trouver la liberté de penser, mais elle est impossible parce qu’on ne peut pas s’extraire de la société. En combinant différentes expressions artistiques, il n’a pas arrêté de bouger pour ne pas être enfermé dans une image, une vie.
Là où règne un tabou, il doit être régulièrement brisé pour être renforcé.
Quand elles se rendent compte qu’elles ont été trop loin et qu’il est trop tard, Anna et Emily acceptent avec joie et fatalisme de répondre à cette pulsion de mort qu’impose la société. La mort d’un enfant scelle un point de non-retour et c’est aussi une perte d’innocence. La société ne peut leur pardonner. Elles décident de vivre leurs désirs et leur passion jusqu’au bout. Il n’y a pas de retour possible.
La plupart des personnages de Claus brisent les tabous pour trouver une vérité plus universelle au-dessus de celle des hommes. Je le vois comme quelqu’un qui veut briser la morale tout en étant pudique et en conservant une sorte d’élégance qu’il exprime par la poésie.
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