Luna-Isola Bersanetti quittait Paris à 18 ans pour apprendre la céramique à La Cambre. Son parcours sans faute se voit couronné d'une participation au MAD Graduation Show, une expo réunissant les diplômés designers les plus prometteurs de la capitale.
Luna-Isola Bersanetti: la céramique dans la peau
D'aussi loin qu'elle se souvienne, Luna-Isola Bersanetti a toujours voulu faire de la céramique, « pour le contact avec la terre et les techniques collectives ancestrales dominées par les femmes ». Comme prévu, la céramique la fait vibrer, au point qu'elle rêve de faire vibrer la céramique elle-même. De la mettre en mouvement, de la voir s'incarner. Un fantasme qu'elle concrétise dans un travail de fin d'études, Reptiliennes, où elle mêle porcelaine, textile et performance. Une série unique dont une pièce est à admirer à la rentrée au MAD.
Qui sont ces « reptiliennes » qui ont inspiré le nom de votre série ?
Luna-Isola Bersanetti : Je m'inspire de figures légendaires comme les sirènes ou les femmes à moitié serpent comme Mélusine. Je cherche à les sortir des récits misogynes dans lesquels elles ont été enfermées. J'assemble des morceaux de céramique en porcelaine pour créer des «peaux» reptiliennes qui sont ensuite portées par des performeuses qui leur donnent vie et revisitent leurs mythologies.
Je cherche à les sortir des récits misogynes dans lesquels elles ont été enfermées
Parce que c'est un matériau très fragile, on n'associe pas tout de suite la porcelaine au mouvement et à la performance.
Bersanetti : Il arrive que des morceaux de céramique se brisent pendant la performance mais c'est ce paradoxe qui m'intéresse, cette dualité entre vulnérabilité et résilience. Entre la fragilité de la céramique et la peau épaisse du reptile qui lui sert d'armure. Chacune des peaux que je crée symbolise une mue, une carapace qu'en tant que femmes, nous avons dû abandonner pour pouvoir évoluer dans un monde dominé par les inégalités de genre.
La mode gagnerait-elle à investir davantage les théâtres ?
Bersanetti : Certainement. Je me suis souvent demandé si ma place était dans la mode et les défilés car ce qui m'intéresse, c'est l'artisanat. La dimension artistique mais aussi la pratique collective. Or dans le monde de la mode, la démarche est plus égocentrique.
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